Cet article présente le point de vue de l’auteur et ne représente pas forcément celui d’EcoGeste.ch.

Dr Philippe Roch, ex-secrétaire d’Etat à l’Environnement

Quel automne magnifique, spectacle de couleurs, concert de chants d’oiseaux, senteurs d’humus mêlées aux parfums des fleurs de lierre ! Les tracteurs conduisent les derniers chargements de raisin et une foule de tournesols, la tête penchée, gorgés d’huile attendent la moisson prochaine. Les bourgeons terminent leur préparation pour l’hiver et dans les champs fraichement labourés je vois les premières pousses de blé et de colza capter les rayons chauds du soleil d’octobre.

« J’étais simplement à contre courant, lent, paisible, attentif et reconnaissant envers la nature »

Les castors des étangs de Verbois amassent les branches sous l’eau pour parer aux périodes de gel à venir, la laie laboure la prairie de mes moutons pour que ses marcassins soient suffisamment grands et gras avant les frimas de l’hiver. Récoltes, abondance, générosité de la nature et déjà la promesse d’un nouveau cycle.
Plein de cette rêverie je croise sur le chemin du Rhône un marathon. Le bienfait de pratiquer un sport pour faire fonctionner son système cardio-vasculaire est évident et je salue le bel effort de ces coureurs innombrables, essoufflés, hagards, déterminés d’aller le plus vite possible, je ne sais où. Mais je constate qu’ils n’ont aucun regard pour le paysage magnifique dans lequel ils courent et certains me bousculent à leur passage pour ne pas perdre le temps d’un écart. Ils me font alors penser à notre société, toujours plus pressée d’aller nulle part, sans attention ni respect pour la nature qui nous soutient, fébrile et avide jusqu’à l’épuisement. J’étais simplement à contre courant, lent, paisible, attentif et reconnaissant envers la nature pour cette promesse qu’elle fait chaque automne et qu’elle tient, infailliblement.

L’Illustré 43/08